Depuis quelques années les « découvertes » inter-culturelles et le métissage sont à la mode.
Il s’agit le plus souvent d’une récupération commerciale,
d’une sorte de « recyclage » occidental de « traces » de cultures authentiques.
Non pour mettre en valeur une culture vivante d’aujourd’hui mais pour
propulser une « star » éphémère.
grâce à laquelle une opération commerciale d’envergure sera possible.

Aujourd’hui, en Europe, qui peut affirmer connaître ou ressentir une autre culture que la sienne?
Ou même avoir une idée de ce que peut ressentir un homme d’une autre culture?
Sommes-nous entrain de devenir un « Homo globalus » façonné par une économie internationale?

Pour redevenir nous-même et reconnaître la différence de ceux qui nous entourent,
il ne faut plus se fier à des informations générales mais faire son miel d’expériences vécues,
avec leur véracité et leurs limites, présentées par ceux-là même qui les ont partagées,
et qui assument le risque de se dévoiler tels qu’ils sont.
Nous pourrions même tenter cette expérience avec nos voisins les plus proches,
comme ceux des cités, ou avec le handicapé croisé sur le chemin, mais paradoxalement,
cette expérience est plus facilement acceptée lorsque la marque de l’exotisme est bien visible.

La plus grande différence, immédiatement perceptible, n’est-elle pas la différence de la couleur de la peau?
Cette crainte de la différence n’est-elle pas la source fondamentale du racisme?
N’est-ce pas au départ une nécessité de survie qui devient névrotique dans la peur de l’autre?

« Je ne suis pas raciste! »

Si cette affirmation, souvent réelle, est la marque du respect,
nécessaire pour une vie harmonieuse en société, qu’en est-il dans notre vie quotidienne?
Acceptons-nous réellement cette différence ou s’agit-il seulement d’une tolérance?
Répondre à cette question n’est possible que si je laisse d’abord à l’autre la possibilité de s’exprimer,
librement, dans sa propre culture, tout en acceptant de mettre tout aussi librement la mienne en « danger ».

Le voyageur qui désire se rendre en terre « étrangère » n’a guère que trois possibilités :
• Être un conquérant qui impose sa propre culture,
tout en devant tolérer un minimum les « déviances du sauvage » qu’il vient civiliser, ou exploiter.
• Être un visiteur exotique qui « s’étonne » de la vie de l’autre :
entrent dans cette catégorie aussi bien le touriste que l’ethnologue.
• Ou enfin être comme le galet dans la rivière : immergé, voire poli ou ballotté par une autre culture,
gardant le noyau de la sienne, découvrant dans le flot de la vie une autre réalité.

Mais alors comment en rendre compte?

Difficulté du récit pour celui qui se croit souvent témoin extérieur
alors qu’il « perturbe » par sa seule présence l’expérience.
Difficulté de transmettre dans un autre langage ce qui est déjà formulé par un langage.
Prise d’un seul point de vue, « l’image » de l’autre est impossible à transcrire sans déformation.
Mais par contre travailler à la rencontre de l’autre, jusqu’au moment où chacun cherchera
à formuler dans l’autre culture ce qui est de sa propre culture.
Quête à tâtons que l’on ne peut réussir seul mais que le soutien mutuel permet.

Alors Homme, je chercherai à faire découvrir, à l’« étrange » étranger, ce que Je suis,
tout en l’aidant à formuler dans ma propre culture ce qu’Il Est.